Comme un fil d'Ariane (Sara)

Nanook arrivait devant le premier panneau du circuit touristique du lac. Elle était toujours collée à la jambe de sa nouvelle maîtresse, la déesse incarnée. Elle la suivait sans laisse ni collier, enfin si, avec un collier. Mais pas de laisse, où alors on pourrait en imaginer une invisible. Un lien indestructible. Dès que les deux acolytes, Nanook et Sara, arrivèrent sur le chemin autour du lac, Nanook s'éloigna petit à petit mais toujours en regardant sa maîtresse, pour ne pas la perdre de vue. Dès que quelqu'un s'approchait de Sara, Nanook accourait et grognait, elle était capable de mordre les mollets des gens si elle sentait une menace.
Jamais elle ne laisserait sa nouvelle maîtresse en situation de danger. C'était comme si leurs deux existences étaient liées. Si Nanook laissait Sara être en danger, elle ne se le pardonnerait jamais. Elles étaient trop liées pour que Nanook la laisse sans surveillance plus de cinq secondes. Au cas où qu'un réel danger arrive, Nanook resta sur ses gardes et se rapprocha un peu de Sara. Elle avait beau la connaître depuis seulement une heure, elles étaient unies depuis leurs naissances, par un lien comme un fil d'Ariane.

Pour la première fois depuis bien longtemps, Sara se sentait bien. Elle se sentait sereine, comme protégée par une petite bulle dans laquelle seules elle et Nanook pouvaient se comprendre. La petite chienne ne la quittait pas, comme si elle voulait, elle aussi, veiller sur elle. Elle sourit et regarda le lac. Son sourire s'effaça alors. L'eau. Elle détestait ça. Elle en avait une peur terrible. Elle était venue ici car elle savait que la plupart des chiens l'adoraient, mais elle n'était pas rassurée du tout. Pourquoi en avait-elle si peur ? Seule elle pouvait le dire, mais elle n'en parlait jamais. Elle se contentait d'éviter le liquide autant qu'elle le pouvait.

Lorsque les deux amies s'approchèrent un peu plus de l'eau, Sara se tendit. Elle se figea un instant, regardant le calme plat qu'il y reignait. Elle se perdit quelques secondes dans ses pensées quand Nanook grogna doucement. Quelqu'un venait de passer à côté d'elle. Sara sourit, elle promettait d'être très protectrice et ça ne lui déplaisait pas plus que ça. elle reprirent leur marche, la jeune fille tentant d'être aussi calme que possible mais ça n'était pas évident. Pour penser à autre chose qu'à sa crainte, elle ramassa un bâton avec lequel elle commença à s'amuser.

Nanook restait toujours près de Sara, maintenant elle ne lâcherait plus ses baskets. Dès que quelqu'un passait, elle grognait et montrait ses petites dents de lait blanches. A un moment, Nanook sentit Sara se crisper, elle alla lui lécher la main pour la rassurer. Nanook évoluait, collée à la jambe de Sara, en symbiose parfaite, comme dans une bulle. La jeune chienne se mit en position de jeu dès qu'elle vit que Sara prendre un baton.
Nanook fixait avidement le baton, une lueur de joie dans ses yeux verts. Ca faisait tellement longtemps qu'elle n'avait pas joué dans la neige. Dès que Sara lança le baton, Nanook pris l'allure du will to go. Elle sauta en l'air pour l'attraper, mais se réceptionna pataudement dans la poudreuse. Elle fit plusieurs saut de mouton et alla déposer le baton devant Sara. Un courreur passa un peu trop près et bouscula Sara. Nanook n'appréciait pas les courreurs, mais si en plus ils bousculaient sa maîtresse...
Nanook grogna et s'élança à la poursuite du coureur qui n'avait nullement l'air impressioné par le chiot. Nanook lui mordit le mollet pour le dissuader de bousculer à nouveau Sara. Il se retourna et leva la main sur Nanook qui, par réflexe, se mit sur le dos, découvrant son ventre. Dès qu'il reprit sa course, Nanook lui remordit le mollet, mais cette fois, elle ne s'attarda pas, elle fila à l'anglaise rejoindre Sara. Ah les courreurs...

Sara lança le bâton aussi loin qu'elle le pu et regarda avec un plaisir fou sa chienne courrir derrière le bâton. Sa chienne, la sienne, sa petite protégée, qui la protégait autant qu'elle même le faisait avec elle. Elle éclata de rire lorsque Nanook se ramassa dans la neige. Elle n'était pas très dégourdie, mais ça viendrait. Sara se fit alors bousculer par quelqu'un qui courrait. Nanook se précipita à sa poursuite pour lui mordre les molets, lequel se rebiffa en tentant de la frapper.

" HE ! NE TOUCHEZ PAS A MA CHIENNE ! "

Mais le temps que Sara bouge, Nanook se défendait déjà. Sara soupira. Elle détestait les humains, certes, mais il allait falloir expliquer à la jeune chienne qu'on ne mordait pas, même si cette fois-ci, elle n'était pas vraiment en tort... Oh zut, elle n'avait pas envie de se prendre la tête dès le premier jour. Lorsque le courreur reprit sa... course (lol), Sara fit revenir Nanook en lui lançant de nouveau le morceau de bois. Mais, emportée par son élan, elle fit une très belle glissade pour atterrir le nez en premier dans la poudreuse ! Elle s'assit en riant, elle n'était pas habituée à ce temps, elle qui venait d'Italie, la neige ne tenait pas aussi bien qu'ici.

La jeune chienne revint sagement au pied de Sara, la fixant de ses yeux verts. Elle déposa le baton et prit une position de jeu. Dès que Sara le lui relança, elle s'élança à sa poursuite. Elle le prit et partit en trottinant, loin de Sara. Un peu trop même. Elle piqua un sprint pour retrouver sa maîtresse. Elle se coucha à côté de la jeune fille et commença à machouiller son baton. Lorsqu'elle l'eut cassé par accident, elle courut près d'un petit sous-bois où elle trouva une fine mais longue branche d'arbre.
La petite chienne peina à ramener la branche à Sara. Elle était quand même assez lourde. Un chien mâle adulte arriverait certainement à la tirer, mais la jeune femelle de trois mois, elle, avait du mal à trainer la branche. Elle parvint tout de même devant Sara et attendit que Sara lui relance la trouvaille. La petite husky attendit sagement en position assise. Elle dévoilait enfin à Sara la partie petite fofolle et joueuse qu'elle avait en elle.

Sara, toujours assise dans la poudreuse, se mit à rire de nouveau. Cette chienne n'en finissait pas de l'étonner. Elle lui caressa la tête et se releva en ramassant le bâton que Nanook lui avait apporté. Elle était courageuse, le bâton était bien tro grand pour elle, mais ça avait l'air de l'amuser, aussi elle lui relança comme elle put.

Tandis qu'elle se débarassait de la neige qui collait à ses vêtements, elle regardait Nanook courrir en souriant. C'était sûr, elle avait trouvé la chienne idéale. Elle avait toujours rêvé d'un chien protecteur. Son tout premier, un chien loup tchèque, avait toujours été un peu sauvage mais très attaché à la jeune fille. Seulement, il avait choisi de vivre en liberté. Plus les jours passaient, plus Sara sentait que son chien était malheureux de ne pouvoir courrir à sa guise. Alors, elle l'avait laissé partir. Elle l'avait revu plusieurs mois après, de loin, avec une femelle et des petits. Comme s'il avait voulu lui dire merci. Elle soupira, heureuse à ce souvenir, puis regarda sa nouvelle amie.

Au lieu de laisse Nanook revenir, c'est elle qui se lança à sa poursuite ! Patinant un peu dans la neige, elle parvint néanmoins à la rejoindre et lui fit signe de la suivre en courant, espérant que la chienne comprendrait son signe. De toutes façons, vu comme elle se dépatouillait mal, la husky la rejoindrait sans problèmes...

Dès que la jeune fille fit signe à Nanook de la suivre, la chienne s'élança pour la rattraper. Elle s'aligna bien avec la jambe de Sara, la fixant du regard. Nanook aboya de joie. Elle avait la langue en dehors de la bouche et haletait. A un moment elle stoppa sa course et goûta la neige. Sentant l'eau glacée fondre sur sa langue, la chienne repartit en trombe en dérapant légèrement. Elle ne tarda pas à retrouver son équilibre et à rattraper Sara.
Elle courrait encore, en parfaite complicité avec sa maîtresse. Nanook était heureuse, elle avait presque totalement sa maîtresse d'avant. Presque, par-ce qu'elle n'oublierait sûrement jamais la personne qui avait remplacé sa mère. Les yeux verts de la chienne restaient fixés, sans même ciller, dans ceux de sa maîtresse. Si la définition du mot complicité était regarder au même endroit au même moment, Nanook et Sara ne vivait pas la complicité, car le chien regarde les yeux du maître, mais le maître ne peut pas regarder dans ses propres yeux. Et pourtant, elles vivaient toutes deux la complicité. C'était donc une mauvaise définition.

Nanook, lorsqu'elle vit Sara s'arrêter étant fatiguée, s'arrêta également. Nanook aussi était fatiguée. Elle n'avait que trois mois après tout, un chiot avait besoin de repos, mais, pour sa maîtresse, sa semblable, Nanook se surpasserait, toujours, encore. Lorsque Sara tomba par terre en sanglot, la jeune chienne alla lui lécher la figure pour la réconforter. Les chiens, comme plusieurs autres animaux, avaient la capacité de se rendre compte de l'état d'esprit des humains. Pour Sara, ça avait l'air d'être un mélange, peur, tristesse, et quelque chose d'indéchiffrable.
Nanook ne savait pas comment, mais il fallait qu'elle arrive à changer l'état d'esprit de sa maîtresse. Qu'elle lui remonte le moral. Elle lui fit plein de lichettes. Elle lui posa la patte sur la jambe, chez le chien, c'était une marque d'affection qui signifiait : je te fais confiance, je t'aime bien. Pour Nanook ça voulait dire ça, mais en plus, cela voulait dire : je suis là pour toi. La jeune chienne alla se blotir contre Sara.

" Tu vois, je me suis toujours dit que je passerais ma vie avec les chiens. En te voyant toi, je me dit qu'un de mes rêves se réalise. Tu es belle et gentille, déjà fidèle, chose qu'un humain est incapable de faire au premier abord. "

Nanook observait l'eau du lac. Elle se sentait bien, sereine. L'eau était paisible et ne bougeait pas beaucoup. Elle resta blottie contre Sara un long moment, appréciant les douces caresses de cette dernière. Elle restait là, les yeux fermés. Elle entendit un bruit soudain. Jamais elle n'avait entendu un bruit tel.
* Coin coin ? C'est quoi ce bruit ?*
Nanook n'avait effectivement jamais entendu le bruit qu'émettait un canard. Elle redressa la tête et chercha la source du bruit. Dès qu'elle eut repéré la provenance du bruit, elle essaya d'identifier l'animal qui avait produit ce son. Corps blanc, cou moyennement long, long bec, assez grassouillet. Elle fit un bond vers l'animal bizarre. Elle sentit une douleur et couina. L'oie l'avait pincée. Elle retourna à fond de train près de Sara, encore perturbée par l'histoire qu'elle venait de vivre.

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» Comme une Habitude [ PV ]